Le poème de Sonia Elvireanu est un appel ardent aux éléments du monde
et en premier lieu à l’eau, comme eau fœtale du poème. Mais le feu, la
terre et l’air tiennent avec force le territoire du poème et le « souffle
du ciel » c’est peut-être bien ce zéphyr qui diffuse sa douceur
contre une violence que sous-tend la lumière et l’obscur. L’intimité de la
poète pénètre le corps du poème et révèle un état d’être que l’on peut
attribuer à une mélancolie endémique si fréquente en poésie. Mais l’état
des lieux de la société, sous-jacente et métaphorique, est là pour
témoigner d’un engourdissement des sentiments, de l’incapacité de vivre
plus chaleureusement, de s’écouter, de se reconnaître – et la poète
d’écrire :
La neige frêle ruisselle
En silence du ciel sur la terre
Le ciel reconnaît la terre,
écrit-elle plus loin et dans
un autre poème :
L’homme est le Ciel, la femme la Terre.
La poète recrée un univers à
sa manière, associant terre et ciel dans un amour éternel dont elle
serait elle-même issue et qui serait sa ligne d’horizon, son seul
devenir. À cette récurrente question de l’Être, la poète cherche réponse
dans la nature et les émotions qu’elle appelle, tutoyant les astres, les
faisant dialoguer et ses mots roulent et résonnent dans le silence de la
neige pour convoquer dans la blancheur de la page les mots du poème. Des
mots qui peu à peu prennent couleur dans le recueil pour former cet
arc-en-ciel tant désiré.
L’appel à l’autre, le désir
de l’autrement, restent en ligne de force dans ce recueil mais ici et là
on perçoit aussi une forte résistance contre ce qu’on pourrait qualifier
— avec quelques réserves — de malheur pour ne pas dire de Mal. Même si,
comme l’écrit Sonia Elvireanu, « la douleur est plus forte que la
pierre »,
c’est bien la lumière qui étreint les mots du poème comme si nommer les
fleurs, les arbres, la mer, le ciel, tout ce qui fait la beauté du monde
allait aider à faire disparaître le mal obscur.
De l’Être, du devenir, des
sentiments plus personnels, de la difficulté de communiquer en glissant
un regard sur les héros de l’antiquité, sans oublier l’écriture du poème
et la nostalgie de ce qui peut-être sera indéniablement perdu, la poète
navigue, avec douleur certes, sur les flots de l’océan poétique pour
approcher ce mot qui ne peut s’affaiblir : l’espérance.
Monique
W. Labidoire
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