Entretien avec Gisèle Gueller
Que
représente pour vous la publication de petits textes sur FB ?
C’est un
exercice quotidien auquel je m’oblige pour le plaisir de l’exercice.
Trouver quelque chose à mettre en mot.
J’aime
aussi le lien qui s’est créé avec des amis virtuels ou non et qui me
poussent, par leurs commentaires, à continuer.
C’est
comme un journal de bord où je ne raconte que ce que j’ai envie de
raconter. Ma vie personnelle, personne sur FB ne la connaît. Je la protège.
Par contre j’emmène les lecteurs avec moi dans mes
voyages, déplacement, coups de cœurs et coups de gueule, mes petits riens
de la vie qui en font sa richesse.
Quelle
place occupe l’histoire familiale et la Corrèze dans votre écriture ?
J’étais
une enfant bavarde et sensible avec une mère défaillante et empêchée mais
très aimante et un père bavard et poète dans sa joie d’être au monde et de
s’émerveiller du vivant.
Une histoire
familiale avec des failles, des peurs qui ont fait naitre en moi le désir
de réparer. Mon enfance a été baignée de la Corrèze puisque toutes les
vacances scolaires, je les passais dans la ferme familiale de mes
grands-parents maternels. Là je pouvais gambader à ma guise et me saouler
de liberté et des beautés qui m’étaient données.
La nature
a été un éveil et une source d’admiration. J’aimais m’ensauvager et les
temps de vacances n’étaient jamais assez longs.
J’aime
écrire cette nature et tenter de mettre dans des mots les sensations fortes
qu’elle me procure.
J’écris
comme je respire, comme un souffle indispensable à mon existence.
Avez-vous
un lieu ou un moment favorable pour écrire ?
J’écris le
plus souvent sur mon ordinateur posé sur mes genoux. Dans un fauteuil avec
les jambes allongées ou dans mon lit.
La nuit
est le moment le plus riche pour écrire, dans le silence de la nuit je peux
écrire des heures quand je suis inspirée.
Il me faut
du silence pour écrire.
L’Imbécile et l’Encyclopédie a été écrit la nuit entre 22H et 3h
du matin en quatre semaines, même s’il a fallu reprendre le texte en vue de
sa publication.
A Meyssac,
j’aime écrire en regardant la vue superbe sur les collines vertes et sur la
forêt, de ma table de travail. Mon esprit ne doit pas être trop distrait.
Souvent les idées sont dans ma tête et je dois tirer le fil de ses idées
pour que naisse le texte.
Je savais
lire à 4 ans et j’ai été un véritable petit rat de bibliothèque !
Enfant, le club des 5 et le clan des 7 ont nourri mon imagination. Puis ce
fut la rencontre avec Colette vers 20 ans. Le coup de foudre pour cette
écriture qui sait saisir avec des mots les choses simples de la vie et les
sentiments. Colette est dans mon panthéon aux côtés d’André Gide, de
Maupassant… Et puis Marguerite Duras dont l’écriture particulière sonne
comme une musique ; j’ai adoré. Dans les contemporains, j’aime Marie
Rouannet, Hélène Lafon, Alessandro Barricco dont Océan mer relève du chef d’œuvre. La Conjuration des imbéciles de John Kennedy Tool a été aussi
un coup de cœur. D’ailleurs mon Imbécile est dans la droite ligne de
celui-ci… Vialatte aussi avec ses chroniques et son almanach...La liste
pourrait être encore longue.
Je rêve de
faire une chronique hebdomadaire pour une radio ou un journal !
Quels sont
les liens entre travail social et écriture ?
La
première publication que j’ai écrite était une chronique qui
s’appelait : Chronique anachronique. Elle a été publiée dans un
journal de travail social qui s’appelait PEPS : Pratiques Éducatives
et Pratiques Sociales. Une revue qui paraissait à la fin des années 1980,
début 1990.
J’y
racontais des moments de mon travail d’éducatrice spécialisée et
j’interrogeais les liens entre travail social et société.
L’écriture
est bien antérieure à mon entrée dans le monde du travail. Elle précède mon
choix professionnel.
Je suis en
toute modestie, une femme de la parole et du verbe. J’aime partager avec
les Autres et échanger.
Le travail
social est un travail sur le lien et écrire c’est mettre en mot ces liens
que nous vivons avec les Autres ou ces liens qui nous unissent à la terre
et au monde.
Giselle Gueller
***
Textes et photos publiés sur Facebook
Peut-être quand
sonnera la cloche, tu lèveras ta tête et pour la première fois, tu me
regarderas.
Peut-être
que d’un doigt posé sur mes lèvres pressées, tu glisseras la pointe d’un
baiser, je crois que je frissonnerai.
Peut-être
apprendrai-je le ciel sans nuage, le rocher que Sisyphe a oublié de
transporter, la révolte sans passion, l‘amour sans déraison.
Peut-être,
pour la première une fois, je serai sage.

Le bateau
frémissait, on entendait sa coque craquer.
Comme si
l’appel du large, lui donnait de la force dans les voiles, posait une main sur
le grand mât et ouvrait l’horizon pour le laisser passer.
L’appel du
large.
Qui peut y
résister ?
Il n’y a
pas de terre à découvrir pour justifier le voyage, il y juste cette envie
folle de tout quitter et de se laisser flotter dans les mers du sud aux
couleurs bleues nacrées.

La porte
s’est ouverte sur un grand champ de blé.
J’avais la
tête dans les épis.
La valise
n’arrêtait pas de dire : « je veux partir en voyage, j’en ai marre à la fin
de rester sur l’armoire, allongée ! »
La montre
lui répondait : « ne soyez pas pressée, moi mon temps est arrêté, on a
oublié de me remonter ! »
L’eau
coulait du tableau sur le mur de gauche et se répandait sur le parquet.
L’armoire
comme à son habitude ronchonnait, celle-là était toujours mal lunée.
J’avais
décidé de rester couchée, un hérisson devait me téléphoner.

Sur le
bord de mes lèvres, des traces de sel.
Sous mes
paupières, des traces de sel.
Je ne sais
pas pourquoi, il y a un océan qui voyage en moi.
On s’habitue à tout, même à rien.
Ce n’est pas rien non !
Un rien c’est tout, parfois c’est
tout ou rien.
Ce n’est pas tout mais c’est bien.
Après tout, on ne manque de rien.

Qui te fera marcher quand tu seras
fatiguée ?
Qui prendra ta peine comme on porte
une enfant endormie un soir de fête ?
On murmure que le temps a fait son
effet, que l'heure est arrivée et que nulle ne peut y échapper.
Je ne sais pas que te donner pour
emplir ton bagage. Je ne sais pas.
Peut-être que tu voyageras nue dans
la chaleur de notre amour.
Peut-être...
©Gisèle Gueller
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