Ciel de ma mémoire
Bouclier
de fantômes
Où est ma lumière qui éblouissait
les
pas trompés de l’étoile de plomb
où
sont les gouttes inondant
mon
chemin bercé de l’attente ?
Car longue est la nuit sans accalmie.
Je suis tombée de mon berceau
de
milles couches de sa chair qui
m’ont
tant bercée à tort.
À tort, car ma douleur, ici, effleure
la
peau trempée de l’ascendance.
Où est cette nuit qui m’abritait, où
mon
songe baissait la tête sur l’oreiller,
où
est sa voix câlinée, ses douces mains ménagées,
sonorité
ébahie qui autrefois chouchoutait l’apaisement
de
l’autre bout du continent austère des fantômes ?
À tort, car ma douleur, ici,
s’aiguille
sous
la prunelle qui a trompé mes ravivés :
Songes, Témérités, Espoirs émaciés
Quand elle s’immisce dans ma pensée, emportant ma
solitude,
mes
lèvres cirent leur seule promesse dernière :
« Chaque jour est une main tendue vers la
quiétude ».
La
mémoire des fleurs
Certains jours dans mon pays d’Est m’éveillent la
pluie,
l’eau
qui dérobe les bords des fenêtres
et
la marée qui foisonne ;
Je m’endors lentement comme pour
chasser
la soif des mots ;
comme
si
les
caresses de souvenirs
portaient
la mémoire des fleurs ;
dès
lors
certains
jours je désespère tant
que
je cesse de rêver tout court
le
matin tire sur mes lourdes paupières
serrée
dans les bras d’un inavouable adieu
et
ma tête comme un tambourin
dont
les battements creusent en abîme
au
bas du ventre qui tourne à l’envers
au
plus bas du cœur qui déplore
ce
creux inconsolable qui attarde les adieux
et
peut-être même qu’il détourne les roues des navires.
Ainsi, si tu retournes en arrière
frôlant
les bords de la marée
ainsi
que les fenêtres en appui,
l’eau
qui frisonne,
pieds
engloutis dans le sol,
toute
la mer t’emporterait
sur
ses voiles douces en argent ;
Mais c’est d’abord ainsi qu’au réveil
je désespère,
puisque
je sais
Que même si tu marches toujours vers
mon pays d’Est
les
marées te poussent subitement vers le Nord.
Orage
En moi le jour
cherchant son reflet
d’un lys caresse
l’automne en été
Dans ma couronne vive
épargne la pluie
de ses capricieuses envies
le chemin bercé
Dans
le fleuve qui scintille
mes traits se dissipent
des fleurs acrimonieux
dans la brume extasiée
parmi les saules bleus
et moi j’y disparais
Confluences
Équivoques
Tard dans la nuit
ce
qui éblouit
se
trompe
Croisant ma route
lanterne de fer
de
mon chemin écarte
le
doute ;
Tard dans la nuit
ce
qui éblouit
se
trompe.
Pour autant,
à
deux doigts
son
image
m’ombrage
:
« Mine de rien
elle étire ses ombres »
"Le
temps est perdu et jamais
de
retour”
Morts lovés dans les cryptes
Inscrits les mots
de
la connaissance là où
l’attente
retrace l’horloge.
Des années plus tard je traîne
cette
plaie avec la honte
attachée,
serrée
à
petites gorgées
ravale
le vent l’horloge
«
Crypte secrète
où gémit
une joie
craintive »
Poser
ses
mains là et
tirer
À l’épuisement
des derniers étangs de souffle –
les forces brisées
l’enfance
où
tout
semble perdu où
la
solitude lourdeur et fardeau
efface
toute dichotomie
impersonnels
les mots creusent
le
manque crie
inscrits
sur un scripte déchiré
le
passé sans oubli et la consolation
au
bord du manque
là où j’écris :
« Ma vérité sera captée dans
l’ellipse »
***
Là-bas écriture
Émergence du singulier
Elle
(comme) à la
marge de deux rivières
Le démon côtoie l’ange
La peur l’autre rive
de
ce désir de
traversées
L'Ombre croise une route blanche
Contemple l’immuable
Brise la nuée
Toujours plus limpide
Ombre-sœur, ombre-rêve
L’opacité de l’eau
Cette main que l’étrangère lui tend
à
travers
Que le chant du coq brise
***
Les pierres s’alignent
Dans l’urgence du livre
La poussière enfonce le cœur
d’une
ténèbre
Engouffrée de bords
La lumière plus fade qu’hier
Le soleil encore plus haut
Sur l’autre rive
L’alcôve des silences comme rempart
***
l’effacement
d’une
écriture –
« Jamais
tu
n’y parviendras »
Ton corps prostré (convoité) comme
refuge
Tes mains embaumées de promesses
Tes yeux comme éclairés de
SOLITUDE
Le refus que tu portes
Comme refuge
En signature du manque
Sera la clé de l’écluse invisible
***
Au fond des mots
(Depuis) toujours
Une même énigme :
Sauver ce qu’il y meurt
Ou ce qu’il reste à vivre
***
Dieu se vide de lui-même
et l’homme :
ce trou inconsolable
qui contient sa trace
***
Deux siècles à rayer la fin
Cerner l’espace de deux silences
Je remonte d’un abysse
Rien ne me promet l’ascension
Il suffit de grimper
à
l’échelle d’un manque
©Iren Mihaylova
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