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Chronique de Cécile Guivarch


Le goût du partage de la poésie  
d'un poète italien,
Camillo Sbarbaro


Camillo Sbarbaro est de ces poètes dont l'âme crie et souffle des mots calmes, mais aussi emplie d'une singulière révolte. Sa poésie est chargée de sens. Elle nous transperce. 

"Sa poésie inquiète, faite de révolte contre la destinée humaine, mais aussi de détachement résigné, nourrie de ses seules expériences, sans ambitions philosophiques, s'exprime sur un ton discursif dans une langue simple, essentielle." (Guy Tosi).

Ses poèmes, moins d'une cinquantaine, sont considérés parmi les plus beaux de la poésie italienne du XXème siècle. Ce beau recueil publié chez Clémence Hiver, éditeur participant au prix de la petite édition 2003 sur zazieweb, est tout simplement un bijou. Il est décomposé en plusieurs parties.
La première, Pianissimo, est constituée de poèmes publiés en 1914. Ces poèmes traitent essentiellement de l'âme et considèrent que "toute chose est seulement ce qu'elle est". On sent la solitude de cet homme dans la ville, parmi le monde "maintenant cette marche parmi les étrangers, ce vide alentour...". Un certain mal de vivre bercé par des illusions de mort, une mort qui fait peur. 

"Parfois, quand je marche solitaire
dans les rues de la ville tumultueuse,
j'oublie mon destin d'être
homme parmi les autres, et, comme amnésique,
arraché à moi-même, je regarde
les gens avec des yeux ouverts étrangers.
"
(extrait page 39)

"Toujours absorbé en moi-même et dans un monde à moi
je me déplace comme endormi parmi les hommes.
De celui qui me heurte du bras je ne m'aperçois pas,
et si je regarde intensément chaque chose
je ne vois presque jamais ce que je regarde.
Je me fâche contre celui qui m'enlève
à moi-même. Toute voix m'importune.
Je n'aime que la voix des choses.
Tout ce qui est nécessaire et habituel
m'irrite, tout ce qui est vie,
comme la brindille irrite l'escargot
et comme lui en moi-même je me retire(...)"

 (extrait page 47)

Tais-toi, âme lasse d'être heureuse
et de souffrir (vers l'un et vers l'autre tu vas
résignée).
Je n'entends aucune de tes voix si j'écoute :
ni celle des regrets pour la misérable
jeunesse, ni celle de colère ou d'espoir,
ni celle de l'ennui
            Tu gis
comme le corps, muette, toute plaine
d'une résignation désespérée (...)

 (extrait page 27)
 
C'est aussi un poète de l’amour. Dans la partie Rémanences, nous pouvons lire les poésies pour Dina.
Giuseppe Conte y voit pour sa part "les plus beaux poèmes d'amour écrits en langue italienne depuis le début du siècle".
Dans ces poèmes qui datent de 1931, Camillo Sbarbaro évoque ses états d’âme avant d'avoir rencontré son grand amour ainsi que la force de l'état amoureux dont le silence se nourrit.

"Et ma vie si tu savais ce qu'elle fut,
amour avant de te connaître…
"
(extrait page 90)

"Maintenant que tu es venue,
Que sur un pas de danse
Tu es entrée dans ma vie
Comme un coup de vent dans une chambre close –
Pour te fêter, bonheur si longtemps attendu,
Les mots me manquent, la voix,
Et le silence auprès de toi me suffit.
"
(extrait page 86)

***

Camillo Sbarbaro est né en 1888 à Santa Margherita, en Italie. Critique sévère envers lui même, il laisse à sa mort, le 31 octobre 1967, un ensemble de poèmes que vous pourrez lire dans leur intégralité dans le recueil Pianissimo Rémanences.  Les éditions Clémence Hiver nous donnent donc à lire, pour la première fois en France, l'oeuvre de ce poète qui a marqué la poésie italienne du XXème siècle

Titre : Pianissimo. Rémanences
Auteur : Camillo Sbarbaro
Editeur : Clémence Hiver


Par Cécile Guivarch
pour francopolis
février 2005 

 

Créé le 1 mars 2002

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