Carnet
d’une dendrophile,
de Bernadette
Throo
(Édition
Les Carnets du Dessert de Lune)
par
Ghislaine Lejard

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Après
« Mais souviens-toi du Paradis
», Bernadette
Throo
publie
« Carnet d’une
dendrophile »,
une
célébration des arbres et du monde végétal,
mais aussi de la
vie.
En
dépit des massacres du temps, elle
demeure à l’écoute de
«
tous ces
bonheurs de rien »
et abrite en elle, plus que jamais, des
« soleils têtus ».
(
ref. Revue Textile )
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Bernadette Throo a
su tracer, en toute discrétion, un chemin poétique
profond et dense, loin des
réseaux d’influence. Dans une solitude féconde, elle a
produit une œuvre faite
à son image, de simplicité et de lumière,
étonnée aujourd’hui qu’on vienne à
elle pour lui parler de sa création, elle qui cherche toujours
à comprendre ce
mystère poétique qui l’anime.
Son
recueil : Carnet d’une dendrophile ed Les
Carnets du Déssert
de Lune, est l’un de ses joyaux. Bernadette Throo regarde, observe,
goûte les
délices de la terre et du jardin où le poète
communie avec ses
éléments : l’herbe, la feuille,
l’oiseau, l’écureuil ou l’arbre notre frère qui relie la
terre au ciel ;
dans son jardin le moindre brin d’herbe
révèle : « l’illimité du
monde ».
En
cette poésie, souffle la grâce, elle est en
fraternité d’esprit et d’âme avec
Marie Noël et Saint François, elle a l’écriture
« franciscaine » et
nous offre ses fioretti en ce carnet tout de simplicité, de
limpidité et de
luminosité , comme autant de « brins de
sagesse » à cueillir.
Ghislaine
Lejard
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Extraits
………………………….
- Que
cherches-tu dans le vert des arbres ?
- C’est le vert
lui-même que je cherche
l’essence du
vert translucide
que le soleil
délivre
avec le
vent.
……………………………………….
Au plus frais du jardin
au plus vert du silence
des anges plein la
tête
et le cœur plein
d’oiseaux
tu n’as rien à
transmettre
qu’un bonheur sans objet
hormis ce vert silence.
……………………………………………
Dépouillé
le jardin
n’attend personne.
C’est en soi qu’on chemine
les yeux à terre
jusqu’à cet arbre
qui
royale nudité
vous tire soudain vers
le ciel
creusé de vallons
gris et bleus
où le soir
déjà
se présage
Rameaux
noirs à contre-ciel
ô plénitude
quand l’arbre porte ses
feuilles
à
l’intérieur.
………………………………………..
On
avait
pris le sac et le bâton
La pèlerine sur
l’épaule
d’un pas vif on
était parti
comme pour un
très long voyage,
Mais à la
première borne
un charme suspend le
désir :
en travers du chemin
la hampe d’un brin
d’herbe
infrangible
portant son globe de
rosée
où bat
l’illimité du monde.
Chercher au-delà ?
Inquiète
folie !
……………………………………………………….
À
tant se
baigner dans les arbres
on finit par en garder
trace :
aux poignets
cette ombre vert d’eau
et ces fines
résilles
au coin des yeux, des
lèvres,
nervures d’une feuille
longtemps
pressée.
À
tant perdre ses yeux
sur les pas des oiseaux
on déchire un peu son étoffe humaine
et rendu aux mythologies
sylphe ou dryade
on se dérobe
entre l’écorce et l’aubier.
………………………………………………………….
Même le soir
nous est porte-lumière
tout crépitant d’oiseaux.
L’avril éclate aux branches de l’automne.
Même le soir il fait matin.
De grands ciels lavés nous emportent
et nous voici rendus au plus vif de nous-mêmes
Jubilants, habités.
Éphémères
brûlant leur peu d’éternité.
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Bernadette
Throo est née en 1932 à Nancy où elle a
fait des études de
lettres classiques,
elle obtient l’agrégation et est
nommée professeur de lycée
à Metz, puis à Nancy jusqu’en 1992.
Elle a publié plusieurs recueils
de poésie :
- Matines, ed. Seghers,
- l’Après-toi, ed. À Contre-Silence,
- D’une
enfance, ed. Les Cahiers de
l’Arbre,
- Carnet d’une dendrophile, ed. Les
Carnets du Dessert de Lune,
- Mais
souviens-toi du Paradis ed. Sac
à mots,
- D’un
printemps l’autre ed. La Porte.
Elle aime les jardins, la solitude, la
lecture et
le silence.
"Carnet d’une dendrophile" de Bernadette
Throo,
présenté par Ghislaine Lejard
Francopolis mars 2013
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