Ou les mots cessent de faire la tête et revêtent un visage. |
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GUEULE
DE MOTS
Cette
rubrique reprend un second souffle en 2014 pour laisser LIBRE PAROLE À
UN AUTEUR... Libre de s'exprimer, de parler de lui, de son inspiration, de
ses goûts littéraires, de son attachement à la poésie, de sa façon d'écrire,
d'aborder les maisons d'éditions, de dessiner son avenir, nous parler de sa
vie parallèle à l'écriture, ou tout simplement de gueuler en paroles...
etc. Septembre-octobre
2023 Libre
parole à Michel Herland : Le
sang des poètes. Réflexions
personnelles sur la poésie en
marge d’une lecture de deux livres de Jean-Pierre Siméon (*) Jacques Grieu, Antinomies |
Deux ouvrages sur la poésie publiés coup sur coup par Jean-Pierre Siméon, lui-même poète et éditeur, ne sauraient laisser indifférent. L’auteur expose dans un essai personnel ce qu’est pour lui être poète et rassemble d’autre part dans une anthologie les réponses à cette même question apportées par quelques poètes, pour la plupart célèbres. (1) Des poètes parlent de la poésie Le titre du second ouvrage, La Poésie à vivre – Paroles de poètes, annonce la couleur : la poésie est affaire sérieuse. Il s’ouvre sur un extrait de l’une des deux lettres de Rimbaud sur le « voyant » : « le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens » (p.17). Et bien que Valéry, dans l’extrait suivant, soit loin d’une telle conception, notant simplement combien ce qu’il appelle « l’état poétique » est fragile et accidentel, ils sont tous les deux d’accord pour assigner à la poésie une mission spirituelle : un langage « de l’âme pour l’âme », écrit Rimbaud, « changer son lecteur en inspiré » selon Valéry (p. 26). Selon Rilke, qui vient ensuite, on ne devient pas poète sans « avoir vu beaucoup de villes, d’hommes et de choses, il faut connaître les animaux », etc. Condition nécessaire mais non suffisante, « ce n’est que lorsque [les souvenirs] deviennent en nous sang, regard, geste, […] ce n’est qu’alors qu’il peut arriver que […] se lève le premier mot d’un vers (p. 29). À la Renaissance comme au Grand Siècle, au temps des balbutiements de l’Économie Politique, certains auteurs utilisaient l’analogie sanguine pour illustrer la circulation de la monnaie ou des richesses au sein d’un royaume. Il est intéressant de voir cette image ressurgir ici à propos de la poésie comme processus. Même chose chez Perros, dans cet extrait de Papiers collés : « Elle est comme le sang, reliée à elle-même ». Mais Perros est plus proche de Rimbaud que de Rilke : « Le drame du poète, c’est l’urgence, c’est la révolte, et c’est l’impuissance » (p. 78). Jean-Claude Pinson est partisan comme Perros du repli hors d’un monde voué à l’artifice. La poésie se fait alors « poéthique » ; elle est une voie parmi d’autres pour que chacun puisse devenir « le poète de sa propre existence » (p. 120). Andrée Chedid, quant à elle, n’est pas si loin de Rimbaud quand elle écrit : « Si la poésie n’a pas bouleversé notre vie, c’est qu’elle ne nous est rien. Apaisante ou traumatisante, elle doit marquer de son signe » (p. 65). Parle-t-elle ici du poète ou de son lecteur ? Des deux, sans doute. Philippe Jaccottet va encore plus loin, faisant l’éloge de ces haïkus qui « réussissent à illuminer d’infini des moments quelconques d’existences quelconques » (p. 90). Ce recueil donne également à lire le discours de Saint-John Perse à la réception de son prix Nobel de littérature. On est surpris de lire que Perse, qui avait pourtant une vie bien occupée à part de la poésie, tenait celle-ci comme un « mode de vie – et de vie intégrale » et que, selon lui, le poète ne se soucie pas d’abord d’esthétique, qu’il « tient pour nous liaison avec la permanence et l’unité de l’être », qu’il est « la mauvaise conscience de son temps » (p. 38). N’y a-t-il pas une profession de foi un peu semblable – au niveau du vocabulaire en tout cas – chez Yves Bonnefoy, lorsque ce dernier explique qu’il doit « sans fin puiser dans leur évidence le souvenir qu’il y a sur terre de l’unité, cette racine de l’être au monde » (p. 75) ? Aragon vieillissant s’avère proche de Rimbaud, tout en se souvenant des surréalistes, quand il « appelle poésie cette dénégation du jour, où les mots disent aussi bien le contraire de ce qu’ils disent que la proclamation de l’interdit, l’aventure du sens ou du non-sens » (p. 50). Ses propos détonnent dans un recueil où les auteurs convoqués insistent au contraire sur le sens. Ne s’en rapprochent que ceux de Zéno Bianu et André Velter (in Prendre feu) : « Nous allons suivre ce qui se veut sans suite », ajoutant un peu plus loin, « Est-ce que cela chante ? Ce pourrait être, oui, la seule, la vraie question », et surtout, introduisant enfin la dimension du pur plaisir, ils ajoutent : « Aucune autre écriture ne jubile à ce point […]. On goûte une strophe, on respire une ou deux rimes féminines, on voit une assonance, on entend un enjambement, on a la faiblesse de caresser un bel alexandrin » (p. 114). Quel est ce mystère
d’écrire ? Jean-Pierre Siméon a déjà écrit plusieurs ouvrages sur la poésie, parmi lesquels un Petit éloge de la poésie (2021) d’où est extrait l’un des derniers textes de La Poésie à vivre (2023). Il en précise certains thèmes dans La Flaque qui brille au retrait de la mer, suivi de Matière à réflexion. La couverture du livre porte une sorte de surtitre, « Quel est ce mystère d’écrire ? », qui éclaire le propos. Ce petit livre (39 pages de texte pour la première partie et 24 pages pour la seconde) peut se lire comme une sorte de vademecum à l’intention des apprentis poètes. Non qu’on lui tienne la plume, au poète – chose d’autant plus impossible que la poésie, « le besoin poétique est […] un désir d’effraction » (p. 21), « la compréhension intuitive mais certaine [d’une] vertigineuse et insolente liberté possible » (p. 20) ! Dès lors, le travail du poète consistera en premier lieu à « émouvoir la langue » (p. 41). Tout poète digne de ce nom opère donc une « révolution dans la langue » (p. 15) et le poète professionnel entretient une « relation surinvestie à la langue » (p. 16). « Il se donne absurdement pour tâche de creuser sans fin et d’inventer sa propre langue singulière, jusqu’à y jouer invraisemblablement le sens de son existence » (p. 33). Ce n’est pas tout. J.-P. Siméon ne croit pas qu’il suffise de subvertir la langue. Si, selon lui, « la rébellion fait le poète » (p. 30), il faut entendre celle-ci tout autant comme « une insubordination non négociable aux attendus de la société » (p. 28). Dans un extrait du Petit éloge… reproduit dans La Poésie à vivre, J.-P. Siméon, à l’unisson d’autres auteurs du recueil, indique d’ailleurs que « la poésie postule (n.s.) une autre manière d’être, une autre façon de la vie, une autre façon d’habiter le monde ». Dit autrement, « elle pose comme principe que la vie ne trouve aucunement sa condition, sa justification et sa seule garantie dans l’avoir » (La Poésie à vivre, p. 124). Dès lors la fonction sociale du poète ne serait autre que d’« inventer le langage propre à rendre crédible, convaincante et partageable [une] contre-lecture du monde » (La Flaque qui brille, p. 25). Concernant plus précisément ses recommandations aux apprentis poètes, J.-P. Siméon insiste à juste titre sur le paradoxe du travail d’écriture qui ne peut être vraiment et utilement novateur que s’il s’appuie sur une solide érudition. Il invite pertinemment à se méfier des « coupeurs de ligne » qui s’imaginent que « le retour à la ligne suffit à faire un vers ». Quant à la fameuse inspiration, moteur de tout œuvre d’art, elle n’apparaît pas moins paradoxale puisque fondée autant sur « une disponibilité totale, ultra-sensible à tous les états et dimensions du réel [que] sur un effort, une volonté et un choix qu’interdit peu ou prou l’usage ordinaire et pragmatique du réel » (p. 46). La deuxième partie, Matière à réflexion, se présente comme une suite de cent-cinquante-deux aphorismes dont beaucoup sont à méditer. Quelques-uns sont empruntés, détournés comme celui-ci : (69) « "La forme c’est le fond qui remonte à la surface" » (Victor Hugo). D’où l’abondance des formes vides » (!). La plupart sont originaux. À retenir, parmi bien d’autres : (2) On n’écrit pas des poèmes pour
gagner sa vie. Mais on peut y gagner la vie. (10) Il arrive que pour un vers,
un poème, un recueil, le poète ait l’oreille absolue. Pour le lecteur ça
saute aux yeux. (34) Poème : tissage,
métissage. Surtout pas broderie. (52) Un vers libre doit être un
vers, c’est-à-dire mesuré. Même irrégulière d’une mesure précise. Décidée. (75) La poésie ne corrige pas la
vie (la vie n’est ni juste ni injuste, elle va) mais elle seule la comprend. (82) Rimes et assonances,
pourquoi pas ? Mais comme en font les ruisseaux. Sans système. (86) En poésie l’oreille vaut
mieux que l’œil. (98) Il n’y a pas de poésie sans
vers (rythme, tension, mesure) même dans la prose – dans ce cas la prose est
un camouflage (Gracq, Duras). Poèmes en prose, vers latents. (117) La poésie est la seule
façon d’habiter la langue. Dans tous les autres cas, on ne fait que la
traverser, pressé d’en sortir. (138) Non pas les mots attendus,
mais ceux qui ne nous attendent pas, c’est la logique du poème. (145) Qu’importe le poème si un
seul vers foudroie. On comprend moins ce jugement à l’emporte-pièce sur les haïkus : (128) Écrire un haïku en français ? Comme
naviguer en pirogue à Amsterdam ou en gondole sur la Seine. Je ne sache pas
que les Japonais écrivent des sonnets. Encore qu’il reste à vérifier que le sonnet soit inconnu des Japonais, au nom de quel bizarre principe de pureté intangible celui qui prône la liberté avant tout peut-il refuser d’emprunter ailleurs des formes, chez nous, nouvelles ? La vogue du pantoun à la française, au XIXe siècle, où se sont brillamment illustrés des poètes comme Hugo, Théodore de Banville, Leconte de Lisle, Verlaine et bien d’autres, y compris Baudelaire (Harmonie du soir) témoigne suffisamment en faveur de tels emprunts (2). Toujours est-il que même si l’on ne voit guère de pirogues à Amsterdam, la pratique du haïku s’est désormais largement répandue sous des formes plus ou moins canoniques. On a vu d’ailleurs ce qu’en pensait Jaccottet (3). Stupeur et tremblement C’est en deux mots notre réaction à la lecture de ces deux ouvrages (non certes celle des conseils raisonnables avancés dans les aphorismes cités en dernier lieu). Stupeur : ce serait donc cela la poésie ? Tremblement : c’est donc que nous n’avons rien compris, cette fréquentation assidue des poètes pour rien, ou plutôt pour rater l’essentiel ! Il n’y aurait de poésie qui vaille si elle n’est une révolte face aux désordres du monde, si elle n’exprime pas des valeurs supérieures, voire spirituelles. En d’autres termes le poète a une mission à accomplir, un rôle social, l’art sera politique ou ne sera pas. On ne défendra pas ici l’idée que la poésie n’est que de l’art pour l’art ; il y a tant et tant d’exemples du contraire. Au hasard : les Fables de La Fontaine, les Châtiments de Victor Hugo, les stances de Péguy sur le chemin de Chartres, la Fugue de mort de Paul Celan… Mais ne vouloir considérer que cette poésie engagée, c’est faire trop vite marché de pans entiers d’autres univers poétiques, lesquels, loin de tout souci d’un quelconque sacré, laïque ou religieux, ne visent que le plaisir. Et l’on ne parle pas seulement des poèmes ne cherchant visiblement qu’à amuser (Le Pélican de Desnos pour n’en citer qu’un), il suffit de se plonger dans n’importe quelle anthologie pour constater que si les poèmes contiennent souvent une sorte de morale, celle-ci est le plus souvent un prétexte pour raconter avec de beaux vers. Un fait est incontestable dans ce qui a été dit plus haut. La poésie suppose un rapport surinvesti à la langue, et ce depuis toujours. Déjà chez les troubadours, ici Peire Vidal (~1150 ~1210) : Ajostar e lassar Sai tan gen
mot et so, Que del
car ric trobar No*m ven
hom al talo. (Ajuster et lacer / Les mots et les sons si bien je sais / Que dans le cher et riche trobar / Nul homme ne m’arrive au talon.) Plus près de nous Perse dans Exil : Voici que j’ai dessin d’errer parmi
les plus vieilles couches du langage, parmi les plus hautes tranches
phonétiques. Et pour citer un tout contemporain, Claude Minière : Je vais chercher les mots, juste savoir pourquoi ils sont tombés si bas les amener à leur sens peut-être ne veulent-ils pas mais à l’air faire un peu de bruit L’Année 2.0 (4) Il ne manque pas moins une dimension essentielle dans les Paroles de poètes rapportées ci-dessus, la dimension cathartique du poème, quand celui-ci sert d’exutoire à un chagrin trop fort, chagrin d’amour, le plus égoïste qui soit, ou – cela existe aussi, évidemment – révolte authentique contre les scandales et les injustices. À force « d’ajuster et lacer les mots » afin d’exprimer ses sentiments, le poète se prend souvent au jeu et la désespérance se mue en pure jouissance d’écrire. All the world’s
a stage And all the men and women merely players Les mots du grand Shakespeare dans Comme il vous plaira doivent être pris au sérieux : à nos accès de sincérité se mêle toujours une part plus ou moins grande de comédie (5).
Nietzsche : « Si quelqu’un disait sérieusement que les poètes mentent trop, il aurait raison ». Ainsi parlait Zarathoustra, lequel ajoutait ceci : Tous les poètes croient qu’il
suffit d’aller se coucher sur l’herbe au versant d’un coteau solitaire et de
prêter l’oreille, pour saisir quelque chose de ce qui se passe entre ciel et
terre. Et dès qu’il leur vient des
émotions tendres, les poètes pensent que la nature est amoureuse d’eux et
qu’elle s’approche d’eux en tapinois pour leur chuchoter des secrets à
l’oreille. (Ainsi parlait Zarathoustra, « Des poètes ») Autant pour la mission sacrée et la clairvoyance des poètes ! Bien sûr, tout ne doit pas être pris au pied de la lettre chez Nietzsche, d’autant que Zarathoustra – qui n’est pas à un paradoxe près – se compte lui-même parmi les poètes et les menteurs. N’empêche que l’avertissement doit être pris au sérieux : couché sur l’herbe ou retiré dans sa tour d’ivoire, qu’il se veuille sincère ou pas, le poète, souvent, affabule. Le lecteur le sait bien qui ne cherche pas avant tout chez les poètes des traités de morale ou des découvertes essentielles sur la condition humaine. L’amateur de poésie est d’abord quelqu’un qui, lui aussi, surinvestit dans la langue à la recherche de ce plaisir qui vient des rapprochements audacieux, des images inattendues et, tout aussi indispensable, de cette petite musique intérieure sans laquelle il n’y a pas de vraie poésie. Cela s’appelle la beauté. Le poète est comme un musicien (« De la musique avant toute chose » écrit Verlaine au début de son Art poétique) qui composerait avec des mots, des phonèmes au lieu de notes. Des chansons (les cansos des troubadours), des sonates (les sonnets), des symphonies (les grandes odes), tout est permis du moment que le poète maîtrise son métier de compositeur. Il peut aussi bien obéir à des règles fixes, ou inventer ses propres règles, ou encore, comme c’est devenu la norme aujourd’hui, laisser libre cours à son inspiration, y compris sur le plan formel, quitte à glisser ici ou là la réminiscence d’une forme ancienne, par exemple un alexandrin bien frappé, comme très souvent chez Perse. Nul besoin de tout comprendre pour se laisser emporter dans les méandres d’un poème. Ainsi les meilleurs exégètes de Césaire ne sont-ils pas toujours d’accord sur le sens qu’il convient d’accorder à telle ou telle image : le poème résiste mais le mystère fait aussi partie de la beauté. Aujourd’hui, cependant, alors que le vers s’est entièrement libéré, qu’il n’y a plus vraiment de genre poétique, qu’il n’y a pas non plus de grande figure qui pourrait servir de phare, faire école, l’amateur a perdu sa boussole. Ouvrir une plaquette d’un auteur que l’on ne connaît pas encore, c’est plus que jamais prendre le risque de tomber sur les essais maladroits d’un de ces « coupeurs de ligne » justement brocardés par J.-P. Siméon. Mais c’est aussi la chance d’une belle découverte. Il en va de la poésie contemporaine comme de l’art contemporain en général – et qui pourrait s’en étonner ? Et le message dans tout ça ? Il faut revenir sur cette question, essentielle à lire les deux ouvrages dont on a rendu compte plus haut. S’il est un domaine où la formule de McLuhan se vérifie, c’est bien la poésie, « le médium, c’est le message » !, ce que, en l’occurrence, on entendra ainsi : quand j’ouvre un livre de poésie, c’est de la poésie que je veux d’abord lire, un agencement de mots et de vers conçu pour me plaire. Mais alors quid de la mauvaise conscience, de la révolte, de l’être ? Bien sûr, la poésie « ne veut pas rien dire » (Rimbaud) (6) - sauf dans quelques cas extrêmes elle signifie quelque chose… au gré du poète. S’il est agité par une révolte contre l’état du monde, cela transparaîtra dans ses vers. S’il est émerveillé par le spectacle de la nature, ses vers raconteront tout autre chose, etc. De chacun suivant sa sensibilité ! (1) Petit éloge de la poésie (Gallimard - Folio, septembre 2021, réédition juin 2023) et La Poésie à vivre. Paroles de poètes. Choix des textes par Marie Gargne et Jean-Pierre Siméon. Édition et préface de Jean-Pierre Siméon (Gallimard - Folio, juin 2023). (2) Cf. Georges Voisset, Histoire du genre pantoun. Paris, L’Harmattan, 1997. (3) Pour en savoir davantage : Shintarô Nakayama, Philippe Jaccottet et le haïku. (4) Claude Minière, L’Année 2.0, Paris, Tinbad, 2023. (5) Même si ce n’est pas exactement ce qu’il fait dire au personnage de Jacques dans la pièce Comme il vous plaira, puisque ce dernier évoque à la suite les sept étapes de la vie au cours desquelles nous sommes contraints, en effet, de jouer des rôles très différents. (6) Lettre à son ancien professeur Izambard, 13 mai 1871. ©Michel Herland
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(*) Ah, Dame Poésie,
quand tu nous tiens ! On peut dire à ton endroit et en ton nom (comme un
peu – excusez du peu ! – à l’endroit et au nom de Dieu…) tout et son
contraire, tout sera également vrai en quelque sorte… Tant Elle (tout comme –
excusez du peu ! – Lui…) est « multivers », pour paraphraser
un concept à la mode dans notre monde pseudo-scientifique. Alors, dans les prises de positions
– comme le montre la peinture du poète Jacques Grieu – il y a toujours des
points communs… ou plus précisément, des intersections de plans donnant l’impression
que les formes coïncident dans l’espace le long de leurs trajectoires de
courbure. En l’occurrence
on trouvera la même appréciation chez notre auteur, comme chez l’auteur qu’il
commente, du surinvestissement dans la langue, du travail de sape par
rapport à l’expression et à la pensée communes, de l’effet cathartique et
« dépaysant » de la poésie. Pour le reste, chacun trouvera de toutes les
façons son bonheur, dans l’une ou dans l’autre des positions qui se posent
apparemment face à face (sinon dos à dos), mais qui en fait sont tout
simplement complémentaires, tant l’univers poétique est inépuisable !
Plaisir, jeu, simulation, dissimulation, démasquement, révolte, prophétie,
vision, révélation, mission, gratuité, découverte, extase, beauté, vérité, … n’est-ce pas tout
cela et plus encore, bien plus, qu’est la Poésie pour celles et ceux qui la
lisent et/ou l’écrivent et/ou la vivent ?... Le sang – comme
le sens – des poètes est le plus riche, allant jusqu’à surpasser de loin l’ADN purement
humain et purement terrestre !... (D.S.) |
Michel Herland Francopolis septembre-octobre
2023 Recherche : Dana
Shishmanian
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Créé le 1 mars 2002