Billet d'humour ou ballade d'humeur
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Les Instituteurs

PAUL. Les hommes d’aujourd’hui sont vites abattus, prêts à renoncer à ce qui fait leur valeur ; le courage manque à tous les instants de nos vies. Il suffit de regarder autour de soi, les gens louvoient face à leurs problèmes, et au-lieu de rechercher des solutions, préfèrent tourner autour, imaginent des excuses, pire, des explications, ils en appellent à la philosophie, à la psychologie, à la sociologie, on veut mettre un nom savant sur toutes les choses qui nous dérangent, de peur de regarder en face la réalité. Nous sommes devenus des peureux ! Nous ne voulons voir dans nos problèmes que des petits ennuis passagers sans gravité quant en fait la maison brûle !
MARCEL. Qu’est-ce qu’il nous fait notre cher Paul ?
GEORGES. Une crie aiguë de défaitisme ? Non, pas vous, Paul, vous n’avez pas le droit. On compte trop sur votre intelligence clairvoyante pour nous épauler, nous guider dirais-je et voilà, patatras ! le mythe s’écroule…
MARCEL. C’est « l’effet de la Présidentielle » on m’en a déjà parlé, l’autre jour…
GEORGES. Avec effets inattendus, vous avouerez.
PAUL. Oui, j’avoue, il doit y avoir de cela !
GEORGES. Il faut dire que tout ce qu’on entend, depuis plusieurs mois, finit par nous taper sur le système cérébral !
MARCEL. C’est ce qu’on appelle des dégâts collatéraux ! Finalement, c’était mieux quand cela avait lieu tous les sept ans, on avait le temps de reprendre souffle…
GEORGES. Moins de démagogie, moins de promesses dont on est sûr qu’aucune ne sera tenue.
PAUL. Oui, mais cinq ans ou sept ans, l’attitude reste la même ; de peur d’avoir à affronter son électorat, de l’irriter, alors on parle le moins possible des choses qui fâchent !
MARCEL. « La caresse dans le sens du poil » est devenue un art qu’on enseigne dans les écoles d’admi¬nistration…
PAUL. Avec la langue de bois, ça fait la paire ! On a peur de dire les choses, d’appeler les choses par leur nom, quitte à froisser certaines personnes, pire, à les offusquer… On préfère la guimauve au poil à gratter !
MARCEL. On a peur que les gens descendent dans la rue…
PAUL. N’aillent pas voter ou votent pour les extrêmes, ce qui est pire !.
MARCEL. On veut la paix, à tout prix, si on peut payer pour l’obtenir, on paie !
PAUL. C’est comme dans les familles, vous n’entendrez jamais une mère de famille se plaindre ouvertement des méfaits de son fils, elle l’excuse, elle lui donne des circonstances atténuantes : quand une bonne semonce ferait mieux l’affaire, mais ça, elle ne veut pas y songer… mais les choses bougent, oui, oui, les choses bougent, quand même, là, devant nous, en ce moment…
MARCEL. Messieurs, une lueur d’espoir – la première depuis un moment – vient d’être énoncée par l’ami Paul.
PAUL. Mon petit-fils qui est en CM1, eh bien ! il est tombé sur une maîtresse qui fonctionne avec des méthodes que je reconnais ; on apprend par cœur, on travaille sur les mots, l’orthographe est mise en valeur, l’écriture, tout simplement, l’écriture lisible, les lettres cor¬rectement formées, cette dame dit qu’une copie ne doit pas être un hiéroglyphe qu’elle doit déchiffrer, rien que du bon sens ! Le maintien, le respect de l’autorité, l’obéissance…Rien que du bon sens. On se lève quand la maîtresse rentre en classe, on ne parle pas tous en même temps… Rien que du bon sens !
MARCEL. Vous voyez bien que tout n’est pas perdu, mon bon Paul !
GEORGES. On en revient toujours au même, à l’instituteur ! Le garant de notre avenir, c’est lui. Il détient les clefs de notre avenir… Honneur et reconnaissance à l’Instituteur !
MARCEL. Mais ils ne s’appellent plus comme ça !
GEORGES. Eh bien ! Commençons par leur rendre leur vrai nom, Instituteur, celui qui instruit, le plus noble des métiers qui soit.
MARCEL. Moi, ce que j’ai le mieux connu, ce furent les institutrices et je me souviens que celle que j’avais en CM2, j’en étais follement amoureux. Jamais une angine, une bronchite, un mal de ventre m’auraient empêché d’aller à l’école. Pour rien au monde je n’aurai manqué une seule journée avec ma maîtresse. Oui, messieurs, c’est comme ça ! A un point que je me demande avec le recul que si je l’avais eu tout au long des études, je suis sûr, que le bac, je l’aurai eu !
GEORGES. Ah ! Si elle c’était douté de l’effet qu’elle produisait sur vous, aujourd’hui, elle en rosirait de plaisir… Mais mon cher Paul, le fait reconnu de refuser de voir la réalité en face, c’est on ne peut plus humain. La réalité fait peur, la maladie fait peur, demain fait peur, manquer d’argent en fin de mois pour payer le loyer ou de nourriture tout ça fait peur, alors, il faut trouver des adjuvants, des palliatifs, appelez ça comme vous voudrez.
MARCEL. L’alcool, par exemple…
PAUL. Bien évidemment, mais aussi la drogues, les drogues devrait-on dire.
GEORGES. Mieux, l’oubli de la réalité dure et méchante. Mettre un filtre entre soi et la vie, soi et les autres, soi et les ennuis, retourner la lorgnette et ne regarder que par son petit bout, c’est plus reposant…
PAUL. Oui, mais un jour, la vie, dure et méchante, vient vous arracher la lorgnette et vous la remet à l’endroit, bien en face des yeux et c’est le drame.
MARCEL. Ou est la solution, alors ?
PAUL. Etre assez fort pour regarder la réalité en face et ne pas faire comme nos hommes politiques qui passent leur temps à nous dire que la dette du pays est abyssale et hypothèque l’avenir de nos enfants et nos petits-enfants, mais, hors du discours ne font rien de concret pour soigner ce cancer qui nous ronge… Les problèmes d’une nation sont les mêmes que ceux d’un ménage, seul change l’ordre de grandeur des chiffres, ici on parlera de milliards, là de centaines d’euros, c’est la seule différence !
MARCEL. Bon, je vais aller m’en jeter un petit au zinc d’en face, toutes ces paroles m’ont vraiment déprimé !
GEORGES. Ou alors, je me demande si je ne vais pas m’inscrire aux cours du soir de mon quartier pour goûter aux charmes des néo-instituteurs, histoire de soigner mon angoisse existentielle ! Si voter ne sers à rien, s’instruire ne peut pas faire de mal, même à nos âges !
PAUL. On ne peut pas laisser dire cela. Le vote est un devoir civique, c’est le premier pas vers un travail de refonte, voyons, mes amis ! Ma mauvaise humeur du début doit être prise avec modération…
MARCEL. Comme un verre d’alcool, diriez-vous ?
PAUL. Pourquoi pas ! Une fois le constat établi à nous de montrer l’exemple aux jeunes.
MARCEL. Vous voudriez que nous nous présentions aux élections ?
PAUL. Je n’en demande pas tant ! Mais déjà nous réformer, nous, pour nous, comme exemple à notre entourage proche, quel merveilleux challenge, non ?
GEORGES. Je me sens des ailes de présidentiable !
PAUL. Ne rêvons pas ! A nos âges, c’est fini, quoique certaines personnes bien connues dépassent largement l’âge de la retraite, suivez mon regard !
GEORGES. Bon, c’est décidé, on s’inscrit tous aux cours du soir du quartier…
MARCEL. Histoire de foutre la merde !
GEORGES. Non, sérieux, tout au moins au début.
PAUL. Vous voyez, vous retombez dans les travers que je dénonçais, il y a un moment. Non, si on s’inscrit, il faut s’engager à suivre les cours jusqu’à la fin de l’année scolaire.
MARCEL. Je vais réfléchir, moi et les études, à l’époque c’était déjà pas mon truc alors à mon âge, je doute fort que les choses se soient arrangées…
GEORGES. Oui, mais imaginez avoir une maîtresse qui vous ferait tourner la tête, comme au temps du Primaire…
MARCEL. J’ai passé l’âge de rêver !
GEORGES. Alors, il nous reste plus qu’à continuer à nous former au contact de nous même, à écouter les propos raisonnés de l’ami Paul…
MARCEL. Et pour finir, boire un petit canon pour faire assimiler les enjeux de notre société, enjeux bien complexes pour un petit gars comme moi !
GEORGES. Le verre de l’amitié, aujourd’hui, quoi de plus noble, finalement !

Michel Ostertag
pour Francopolis avril 2007



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Créé le 1 mars 2002

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