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Patrick Packwood sélection mars 2004

 

Portraits-paysages 

 

 "le ciel est éphémère"
- Michel Dallaire, PONTS BRÛLÉS

 




les nuages seront toujours les nuages
leur configuration change
leur couleur varie
chaque formation a son nom

mais

les nuages seront toujours les nuages


indiscernables dans le noir
ils occultent pourtant les étoiles

blancs, gris, acier, bruns, noirs
leur couleur défini le temps
détermine la teinte des eaux
cache le bleu et la lumière

les nuages seront toujours les nuages
ils masquent immanquablement la réalité
à en obscurcir les cœurs

la vérité est dans un ciel dégagé

 

***

des colonnes se dressent
hautes, droites et inébranlables
couvertes de calculs
laissés là au nom de l'espoir

il en émane une douce tendresse
un accueil les bras grands ouverts

l'ascension commence
dans les trébuchements
mais les membres se tendent
remettent gentiment debout
inconditionnellement

les marches défilent
de plus en plus rapidement
facilement
jusqu'au sommet
au-dessus des nuages
la réalité en plein soleil
dans la chaleur

 

***

au sommet
on se sent un peu seul

le bleu du ciel et le soleil
c'est tout

le silence souffle à mes oreilles
la voix feutrée d'un vent tiède
porteuse de plumes d'oiseau

j'ouvre les bras
j'inspire profondément
l'air
et les plumes
sortent de mon corps

mon cœur bat les ailes

les courants d'air se matérialisent
en lignes courbes qui se joignent aux horizons
ils semblent mener
aux mêmes points
dans les illusions des lointains

je prends un couloir aérien
sans tour de contrôle
sans carte du vide

je vole mon destin

 

***

le temps passe
à descendre le soleil
sous les nuages

l'obscurité tombe sur mon ascension

les plumes dans l'air se condensent
deviennent lumineuses
renaissent en étoiles

j'avance au vent stellaire
dans une artère du ciel
lentement délivré
de la pression atmosphérique

exposé aux rayonnements durs
mon corps mue
mes facultés changent

je peux distinguer
la courbature
de ce vieil univers

 

***

une constellation sursaute

quatorze points d'argent
s'avancent vers moi
m'entourent

"que veux-tu ?" me demandent les machines

je peux voir mon reflet
dans les entrailles de chacune d'elles
allongé
spiralé
arrondi
aplati
facetté
vieilli
rajeuni
déformé d'une façon ou d'une autre
j'ai l'air mal à l'aise dans ces mécanismes de métal poli

"tu es le maître et tu dois nous ordonner" disent les machines

le maître ?
non, jamais
je ne suis même pas mon propre maître
pas dans cette vie, pas encore, pas...

dans une vie antérieure ?
je ne sais plus
mais les machines prennent un aspect familier

quatorze reflets se tendent les plumes ébouriffées
crient à l'unisson avec ma volonté "disparaissez !"
implosent

je suis de nouveau seul
avec des étoiles qui ne scintillent pas dans le vide

avec un nouveau passé qui revient me hanter

 


Patrick Packwood

 

 

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Créé le 1 mars 2002

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