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Patrick Delaplace Trinquet , sélection septembre 2013

  il se présente à vous


  Texte 1 (sans titre)

Je quitte alourdi de fatigue ce drap endiablé qui chaque nuit enveloppe mon âme comme un suaire, le jour, la nuit ne signifie vraiment rien quand on ne peut retenir sa respiration jusqu’à l’aube.

Le temps, le mien est un fruit vert exalté par la maturité des heures, des minutes, secondes insignifiantes forment malgré tout l’amertume de mon existence.

La lune coagule la nuit comme un jaune d’œuf, est-ce ma paupière qui tressaille, la lune d’argile comme un muscle qui tremble, cœur de la nuit dans le ciel de lune.

La nuit est noire et lisse comme la Mort, la Mort hypocrite ignore les flétrissures, les rides sur les visages de mes pauvres morts, vieillesse apitoyée ou l’enfance ne mérite plus d’être redressée.

Ce matin j’ai rencontré le petit grand père, j’admire l’homme et sa dignité privée, il a traversé sa nuit sans s’illusionner, il y a invoqué sa terrible souffrance et en est ressorti avec quelques écorchures au fond de l’âme, il a supporté sans jamais faiblir l’épreuve de sa maladie, l’expérience de la sagesse, la patience est la vertu des anciens.
La semaine dernière on a enterré six morts dont deux suicidés qui ont voulu quitter leur existence végétative, la jeunesse est une rédactrice stagiaire dans le combat réel de la vie, mourir n’est qu’une simple réalité, il faut tourner la page.

Je marche seul sur la rue, en voici un qui a déjà établi son diagnostique, je ne quitte pas des yeux son pitoyable regard de naphtaline, il y a ainsi des regards qui vous détraquent la volonté, mais sa pensée a traversé ma conscience sans laisser vraiment de trace, les regards s’enferment dans des attentions excessives.

L’œil niché dans la paupière est souvent un fruit trop mûr, certains sont d’une impassibilité confiante, je suis une évidence qui crève enfin les yeux, d’autres me dévisagent avec une attention soutenue, je baisse la tête.
La pluie tombe sur le village, un rayon de soleil miroite l’eau sale du caniveau, des pigeons voyageurs traversent mon ciel que découpe le long clocher de mon église, j’éprouve une étrange sensation de lourdeur, l’angoisse m’envahit, une odeur de feuille et de terre monte du bitume, la fatigue semble peser sur moi comme un souci d’exactitude.

De même que le feu, l’eau détruit tout sur son passage, l’hiver, la neige épouse les maisons, les toitures, les cheminées de mon cher village, j’aimerais tant que sa discrétion recouvre mon corps, mes os, l’hiver, le froid avec ses grands yeux globuleux, lumineux, trahissent la nuit qui fait délirer.


**

Texte 2 (sans titre)

Souvent, je laisse couler la voix des gens dans ma tête, je l’avoue à ma plus grande honte, je suis capable de faire croire à l’écoute, je laisse couler la sève, l’acide au fond de mon estomac. Depuis ma plus tendre enfance, je peux converser simultanément avec une ou plusieurs personnes au même moment, je sais ça agace.

Il me faut aller vite dans mes analyses, les gens aiment vous faire répéter les mêmes et sempiternelles choses, vous réclamer des détails sans importance aucune, des précisions, des réalités confidentielles, insensées, bribes de dialogue brut à l’état végétatif.

Aussi cruelle qu’est ma confession, oui j’admire avec indulgence comment certaines personnes sont capables d’inventer leur propre dialogue à force de le désirer, leurs mots sont comme des furoncles, des abcès, ce besoin de me fouiller comme une démangeaison.

 On m’écrit souvent à propos de mes textes, on me parle de l’impensable page blanche, mais un texte bourré d’urticaire devient un déchet quand trop mâché, on s’acharne à vouloir le prolonger, les pensées communes aux écrivains sont des rivalités inévitables, capables d’influences que je m’en amuse.

Pour moi qui ne lit plus depuis des années, ou quelques fragments de textes, l’essentialité d’un roman me déprime là ou dans chaque mot repris la phrase se ferme hermétiquement. Les mots ne traversent jamais les cloisons de l’esprit de l’homme quand ils grandissent dans la solitude et l’inconscience enfantine.

La poésie m’apparait comme la plus précieuse, car le poème s’appuie sur des mouvements d’ensemble, elle ne peut tricher, car elle ne peut supporter l’hypocrisie et le mensonge, la poésie est une conscience critique au langage quand les textes sont devenus inaudibles.
J’aime écrire depuis l’enfance, écrire est une maladie de révolté, ma sueur a l’odeur de la colle et de l’encre, les mots nouveaux me donnent chaque fois une existence, une vie nouvelle, mes mots sont ma pensée, qu'ils m’aident à affronter, m’affronter moi-même dans ma quête de vérité sans repos.

La nuit, avec ma voix machine j’écris, la plume vraie folle de mon âme court comme une lame ardente, mes écritudes traversent l’immensité limpide que découpe une lune éblouissante, elle court à perdre haleine que l’encre de ma nuit recouvre tout, la peur se dissout dans l’ombre violette.

Ecrire est comme une expression de détresse, l’encre violette ça vous noie la douleur, votre visage, vos yeux, ça vous absorbe l’âme dans le buvard du deuil et vous empêche provisoirement de couler, ça vous résonne dans la tête, dans les tempes comme si ça heurtait du papier, écrire que tout est langage et fleur de langage, tout est poésie et fleur de lumière.

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Créé le 1 mars 2002

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